Stanley Colada : un drame au jus passion-mangue-banane
Le Balcon - 15 juillet 2023
Il y a quelques jours, j’ai mis ma jupe fleurie, je me suis déplacée au Balcon, la salle de spectacle de style cabaret de l’Église unie Saint-James, et je me suis commandé une margarita pour assister à l’épisode pilote du radioroman de détective tutti frutti Stanley Colada — La justice des tropiques. Oui, j’ai bien dit tutti frutti.
Un vent de chaleur tropicale est créé par l’artiste Charles Beauchesne, qu’on connaît surtout pour le balado Les pires moments de l’histoire et pour ses spectacles de stand-up historico-humoristiques à sujets plutôt sombres. Co-écrit avec l’auteur prolifique François De Grandpré, le radioroman raconte les aventures fruitées de Stanley Colada, un détective privé qui nous rappelle vaguement notre oncle boomer! Charles explique dans une entrevue avec Noovo.info que le personnage de Stanley, qu’il interprète, est « une espèce de parodie des héros machos des années 1990 » et c’est exactement ce qu’il dégage.
Qui plus est, l’acolyte du détective est appelée Monsieur Vicky et elle porte une fausse moustache lui permettant vraisemblablement de déjouer le bon vieux sexisme de Stanley Colada. Pourtant, Monsieur Vicky est assez futée! C’est l’artiste multidisciplinaire Sabrina Connell-Caouette qui lui prête sa voix très claire et joueuse. Ensemble, le duo insulaire de l’archipel fictif de Monokini tente de résoudre une série d’assassinats, et la disparition de Jack Fuego, un animateur de balado alt-right et mâle alpha. Anne-Hélène Prévost complète brillamment le quatuor oral en interprétant divers personnages, dont la haïssable femme du droitiste disparu au lourd accent anglais. D’ailleurs, celle-ci semble plutôt festive quant à l’absence de Fuego…
Cette action pétillante sortie directement d’un film de Michael Bay se déroule durant le Festival de l’ananas, un incontournable touristique pour l’île vaguement hawaïenne. C’est donc une trame sonore croisée entre Mission Impossible et Lilo et Stitch qui nous accompagne dans l’histoire, en plus de François et de ses quelques notes de ukulélé. Une fausse publicité de brassières en noix de coco s’est même glissée dans le spectacle au moment où on aurait eu droit à une réelle annonce dans l’écoute d’un épisode de balado; je ne dis jamais non à un petit clin d'œil méta!
Les artistes avaient vraiment pensé à tout pour nous immerger dans l’histoire, allant même jusqu’à coordonner la température avec Le Balcon et Météo Média pour s’assurer qu’on se pense réellement les pieds dans le sable des tropiques. Bon, pas vraiment, mais comme c’est un bâtiment patrimonial, la climatisation n’est pas des plus efficaces. Outre la chaleur torride, quoique thématique, j’ai été charmée par cette comédie, et le public semblait l’être aussi.
En plus d’une histoire originale comprenant de nombreux jeux de mots (Vegan With The Wind haha) jouée en direct, j’ai vécu un moment d’apprentissage quand le personnage de Papa Pineapple, magnat de Monokini, explique que l’ananas n’est pas un aliment originaire de la région qui, rappelons-le, est inspirée du réel archipel d’Hawaï. En effet, le fruit était trouvé en Amériques du Sud bien avant la colonisation des îles hawaïennes. Papa Pineapple termine ironiquement son explication en scandant que l’héritage culturel hawaïen n’est pas à vendre, avant de retourner sur son île privée chassée de ses habitants et habitantes indigènes, île financée par son Festival de l’ananas…
J’attends la suite du radioroman comme Stanley Colada attend une excuse pour sortir son hydravion, même si les expressions faciales de Charles vont me manquer.
Écrit par Maryse Gilbert